Jeux de mots.
Les mots ont un sens. Tout ne vaut pas tout, tout n'est pas dans tout, mais toute idée est contestable.
La banalisation du sens des mots, l'utilisation d'un mot pour un autre contribuent à l'affadissement de la langue, à l'affaissement des idées. Au pays de Molière et de Voltaire, les mots sont des joyaux qui souffrent d'un mésemploi.
Ainsi en est-il de :
Dictature qui désigne un système de pouvoir politique exercé sans partage et sans contrôle par un seul homme ou un groupe de personne (comme pour une junte). Le dictateur est la personne qui détient tous les pouvoirs et qui les exerce dans les mêmes conditions.
Salvador Allende, président démocratiquement élu du Chili dans le cadre de l'Unité Populaire chilienne a été victime du coup d'Etat de la junte militaire conduite par le Général Augusto Pinochet, le 11 septembre 1973.
Salvador Allende, lors l'attaque de la Moneda par les troupes d'Augusto Pinochet le 11 septembre 1973
Aussi convient-il d'utiliser ce terme avec justesse plutôt que comme leitmotiv pour nuire, déconsidérer ou exprimer sa haine...
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Fascisme qui est un système politique basé sur la dictature d'un parti unique, qui exalte le nationalisme et le corporatisme, populiste et totalitaire instauré par Mussolini en Italie en 1922 au nom d'un idéal collectif suprême.
Sa version nazie, qui s'est installée démocratiquement en Allemagne à partir de 1933, a fait dix millions de victimes dont la mise à mort était administrativement et institutionnellement organisée et gérée, dans le but de sauver la pureté de la soi-disant race aryenne et de lui assurer son "espace vital".
L'instauration de la terreur est son principal vecteur.
Le nazisme avait une cible prioritaire dont l'élimination totale était programmée : les juifs. Six des dix millions de ses victimes l'ont été parce qu'elles étaient nées juives.
Se permettre de l'employer en dehors de son contexte est comme une seconde mort pour toutes ses victimes.
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Blasphème qui pour le Larousse désigne une parole ou un discours qui outrage la divinité, la religion ou ce qui est considéré comme respectable ou sacré. Utilisé dans un cadre plus général, le blasphème est une irrévérence à l'égard de ce qui est considéré comme sacré ou inviolable.
En France, le blasphème n'a aucun statut spécifique. Rien ne l'interdit, il est donc permis. Et c'est très bien ainsi. Dans le contexte où certaines organisations voudraient le rétablir, il est heureux que la loi ne le permette pas.
Mais, dans le contexte actuel, il faut la comprendre convenablement. Toute religion est une idée que l'homme se fait de sa relation avec la vie, avec la philosophie, avec l'avant et l'après, avec la vie et la mort. Elle est une conception fondamentalement personnelle, voire intime.
Il faut bien comprendre, alors, la portée de la définition qu'en donne la République.
Dans la monde des Lumières, si toute idée est contestable, tout individu est respectable. Ainsi, si toute expression de contestation d'une religion (qui est une idée), quelle qu'en soit la forme est possible, en revanche on ne peut pas mettre en cause les personnes.
Le blasphème ne cible pas les croyants mais la croyance. Toute la complexité est là. Faire semblant de ne pas la comprendre ouvre un boulevard aux radicalismes. Se sentir insulté par une expression blasphématoire est du au fait que ce croyant entretient une relation fusionnelle avec sa divinité. C'est sa façon de voir les choses. Ce n'est pas celle de la République.
La situation réservée au blasphème est très variable dans le monde et l'on peut constater à partir du tableau ci-dessous la tâche qui reste à accomplir pour généraliser la liberté de conscience et la liberté d'expression.
Gérard Contremoulin
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